Si vous cultivez un jardin, on peut parfois vous demander « avez-vous la main verte ? »
Si vous agissez au cœur de projets de transformation numérique, et si votre interlocuteur a lu cet article, il pourra vous demander « avez-vous la main numérique ? »
Tout projet de transformation numérique majeur est confronté de près ou de loin à des sujets d’urbanisation des systèmes d’information.
Pourquoi le terme urbanisation nous parle pour décrire cette problématique consistant à vouloir organiser la colonne vertébrale de son système d’information afin qu’il soit plus aligné avec les objectifs de l’organisation, plus agile, plus évolutif ?
Pourquoi ce terme nous semble aussi parfois galvaudé, surestimé, et qu’in fine des études d’urbanisation aboutissent à des beaux rapports qui sont rapidement oubliés, partiellement ou totalement, car il faut sans tarder répondre aux besoins opérationnels de court et moyen terme ?
The Finger Plan
Les plans d’urbanisation des agglomérations et villes ont été rendu nécessaires car il est apparu évident :
- Que la construction des quartiers et infrastructures nécessitaient des investissements considérables
- Que ces choix avaient un impact évident sur l’ensemble des aspects de la vie de l’agglomération : qualité de vie, performance économique, fluidité des transports, empreinte carbone, …
- Qu’il était très difficile voire parfois impossible de revenir sur ces choix sans investissements tout aussi considérables
On oublie parfois que les systèmes d’information obéissent à des règles similaires.
![](https://www.axensio.fr/wp-content/uploads/2023/07/fingerplan-2.jpg)
Nous prenons comme illustration le cas de l’agglomération de Copenhague au Danemark (histoire de voyager un peu …). Depuis l’élaboration du Finger Plan en 1947, la ville a été organisée sur la base d’un plan régional global où le développement urbain se concentre le long de « doigts » reliés au système ferroviaire et aux réseaux routiers radiaux, et où la ville se concentre le long du réseau routier. Les doigts sont séparés par des coins de verdure qui sont par principe et volontairement maintenus à l’écart du développement urbain.
![](https://www.axensio.fr/wp-content/uploads/2023/08/fingerplan-1.jpg)
Ainsi, l’agglomération de Copenhague est composée de quatre types de zones géographiques :
- la région urbaine centrale (la paume de la main) – the core urban region
- la région urbaine périphérique (les doigts de la main) – the city fingers
- les espaces verts (espaces entre les doigts) – the green wedges
- le reste de l’agglomération de Copenhague
Cette stratégie a permis d’assurer un accès facile aux zones de l’ensemble de la population de Copenhague, ainsi qu’au centre de Copenhague depuis la région du Grand Copenhague. Il a été régulièrement actualisé mais demeure la colonne vertébrale du développement urbain.
Livrons-nous à quelques réflexions sur le sujet.
Concertation, temps long et anticipation
La réflexion ayant mené à ce Finger Plan a impliqué tous les acteurs concernés, en s’inscrivant dans le temps long.
Ce travail a nécessité d’anticiper les points structurants autour desquels l’ensemble des activités des citoyens s’organiseraient et de revoir périodiquement cette analyse.
Il a défini des grands principes autour desquels s’articulent ensuite des politiques d’aménagement locales (dans le Grand Copenhague) : notamment le développement dans la région périphérique (city finger) doit tenir compte des infrastructures existantes et approuvées et des possibilités de renforcer les transports existants.
Les centre-ville et les agglomérations du numérique
Les activités numériques s’organisent autour de domaines fonctionnels, à savoir des data et des fonctions métiers ayant un sens à être regroupées autour d’un objectif métier persistant dans le temps.
Les interactions entre ces domaines doivent être anticipées, elles peuvent être intra-organisation mais aussi inter-organisation (clients, partenaires, …), la structure des données doit permettre l’inter-opérabilité.
La technique n’est ici pas abordée en premier lieu, mais bien les activités vitales de l’organisation (processus, métier, évolution du métier, …).
Un numérique responsable qui pense à l’intérêt de toute l’organisation
La transformation numérique doit se réaliser en restant responsable de l’environnement, à l’exemple des espaces entre les doigts de la main (« green wedges ») du Finger Plan qui doivent être préservés à l’abri de l’urbanisation.
En l’occurrence, chaque habitant (au sein des doigts) peut aller puiser et se ressourcer facilement dans des espaces verts car ils lui sont directement accessibles et qu’il est garanti de leur pérennité dans le temps.
Mais responsable ne veut-il pas aussi dire au service du « bien commun » de l’organisation ? ce qui a des impacts en termes de règles de gouvernance : la planification dans la région du Grand Copenhague ne doit pas entrer en conflit avec le Finger Plan ou d’autres directives nationales d’aménagement du territoire.
La « main numérique » qui aide à mieux se saisir de son avenir
Une main est vitale, que puis-je faire sans ma main ? alors autant en prendre soin :
- Quelle est la paume de votre main (i.e. domaine coeur) ?
- Quels sont les doigts de votre main (domaines fonctionnels ?) ?
- Avez-vous prévu des espaces verts (réservoirs de données ?) ?
- Vos domaines fonctionnels ont-ils bien leurs espaces verts ?
Les préserver et les faire évoluer en fonction des besoins n’est-il pas aussi fondamental que pour les zones urbaines ?
The right business in the right place
Le Finger Plan vise à garantir de bonnes opportunités de développement pour les entreprises en mettant à leur disposition un large choix d’emplacements qui correspondent à leurs besoins futurs. Il vise à garantir que la bonne entreprise soit située au bon endroit, par exemple à proximité des autoroutes pour les entreprises de transport et de distribution, et près des gares pour les grandes institutions régionales, les sièges sociaux et les bureaux.
Ainsi les différents types d’entreprises se voient garantir des emplacements optimaux, notamment en ce qui concerne les infrastructures de circulation.
A chaque nouveau business, se pose la question de son positionnement au sein du complexe urbain, qui sera fondamental pour son développement : de même une nouvelle fonction ou un nouveau module applicatif doit pouvoir se positionner de manière optimale au sein d’un écosystème numérique.
Avez-vous bien anticipé que chaque nouveau business pourra se trouver « in the right place » dans mon éco-système numérique ? qu’il disposera des infrastructures et des espaces verts lui permettant de démarrer et de se développer ? n’est-ce pas vital de le prévoir ?
pour allez plus loin sur le Finger Plan – source :